Jeudi 2 février, rendez-vous est pris avec Bernadette Dallard, élue à Saint-Marcel-d’Ardèche en charge de l’environnement. Depuis deux mandats, cette enseignante aujourd’hui en pré-retraite agit au sein de son village pour mieux prendre en compte l’environnement, en s’assurant à la fois d’une plus grande appropriation de ces enjeux par les habitants et du développement par la commune de pratiques plus respectueuses. Aujourd’hui, son action commence à devenir significative, même si les obstacles sont encore nombreux. On a par exemple découvert l’automne dernier une maladie sur des vignes situées sur la commune, la flavescence dorée, qui demande, selon les autorités sanitaires, un traitement chimique lourd qui lui pose question, étant donné qu’il serait appliqué sur un vaste périmètre intégrant notamment une à deux écoles.
Mais évoquons plutôt les projets entrepris par cette élue tenace. En 2008, un jardin pédagogique est créé sur un terrain situé à proximité des deux écoles, publique et privée, que compte le village. Consciente que le changement viendra d’autant plus vite que les enfants seront éduqués aux nouvelles pratiques écoresponsables, elle considère le jardin comme un premier outil indispensable pour proposer aux jeunes un contact avec la nature et une éducation à la culture des plantes, potagères ou ornementales. Mais le jardin va connaître des difficultés d’entretien pendant les vacances scolaires d’été. Même si le centre de loisirs s’y investit, il manque un relais. Bernadette Dallard va alors solliciter l’aide de l’équipe du Viel Audon. C’est Marie Simon, salariée à l’association Le Mat Ardèche, qui va intervenir en lui proposant de commencer par faire un tour des différents coins nature qu’elle a pu aider à mettre en place sur la communauté de communes des Gorges de l’Ardèche, afin de se rendre compte de la variété des formes que ces jardins pouvaient revêtir. Convaincue de l’intérêt, l’élue lui demanda d’intervenir dans le jardin de la commune pour le remettre en état de marche. Marie Simon proposa plusieurs pistes, parmi lesquelles la mise en place de cultures en lasagne sur bac (pour réduire la gestion des « mauvaises » herbes au milieu des cultures), la mise en place d’un chantier collectif pour une remise en route du jardin qui déboucha par la création d’un chantier adulte régulier (un samedi matin par mois) pour entretenir le jardin, la mise en lien avec différents acteurs de Pétale pour des animations au jardin. Nikolaus Resler-Hatzl de la Compagnie des Sept vents est ainsi intervenu autour de la construction d’une cabane en osier. L’association Bourgs en Transition y intervient également, deux fois par an, dans le cadre des temps d’activité périscolaires (TAPs). Depuis, le jardin a retrouvé un nouvel essor, les écoles s’y rendent régulièrement dès l’arrivée des premiers beaux jours, et les activités périscolaires y trouvent également un terrain idéal le vendredi après-midi avec des adultes bénévoles qui encadrent des activités.
Si Bernadette Dallard a su développer le jardin, c’est en partie grâce à la commission municipale de l’environnement qu’elle a pu mobiliser sur les TAPs en particulier. Cette commission, composée de trois élus et d’une douzaine d’habitants, se réunit une fois par mois pour réfléchir aux actions qu’elle souhaite entreprendre. De l’organisation d’une projection de séquences du film Demain, pour inviter les habitants à échanger sur les chantiers qu’ils voudraient voir adopter sur la commune, à la création d’une voie douce traversant le centre du bourg, les projets sont nombreux. En 2014, la municipalité initie l’opération Un fruit pour la récré pour travailler sur la diététique, les habitudes alimentaires et la saisonnalité. En lien avec un producteur local travaillant en bio, la commune organise chaque semaine pendant la récréation du matin la distribution d’un fruit ou d’un légume cru, préparé par les enseignantes et les assistantes maternelles. Très vite, les enfants ont apprécié ce rendez-vous, trouvant du plaisir à manger un morceau de betterave rouge ou de chou vert cru. Ce projet a pu rencontrer l’intérêt de tous rapidement, notamment grâce à la sensibilisation, menée en classe par les professeurs avant la distribution, autour des couleurs, du gustatif ou du sensoriel du fruit ou légume proposé. Le personnel éducatif s’est pris au jeu demandant depuis des cuit-vapeurs pour cuisiner et pouvoir ainsi proposer des tartes ou des compotes. « Maintenant, estime fièrement l’élue, il faudrait arriver à faire des jus ». Et bien sûr, l’effet sur les pratiques alimentaires des familles s’observe également, certains parents trouvent « l’action super », car cela leur permet d’acheter plus facilement des légumes ou des fruits, car leurs enfants en réclament.
Si l’opération peut sembler encore modeste, Bernadette Dallard et la commission réfléchissent déjà à la création d’une cantine scolaire approvisionnée en aliments bios et locaux. Car aujourd’hui, la restauration scolaire est assurée par une prestation extérieure qui vient des Bouches du Rhône ! La création d’une cantine étant un peu lourde, ils s’orientent vers un nouveau prestataire qui s’approvisionnerait en circuits courts, permettrait davantage de débouchés voire un développement de l’agriculture, sensibiliserait les personnels des cantines à la qualité nutritionnelle des plats. Vice-présidente à la petite-enfance-enfance et jeunesse de la communauté de communes Du Rhône aux Gorges de l’Ardèche, Bernadette Dallard s’est naturellement tournée vers sa collectivité pour envisager ce changement de prestataire. Aujourd’hui, ce projet fait boule de neige et rencontre l’intérêt d’autres communes voisines. Ce qui la ravit, mais complexifie l’opération.
Pour accompagner tous ces projets, l’équipe municipale a choisi d’accueillir un jeune en service civique depuis novembre 2016. Ses missions étendues vont renforcer encore l’action de la commune : sensibilisation des habitants et agents municipaux aux gestes écocitoyens, organisation de réunions publiques autour de la thématique environnementale, participation sur les actions de réduction des déchets, de lutte contre le gaspillage alimentaire ou de promotion d’une aire de covoiturage mise en place en avril 2016. On le voit ainsi, à travers l’exemple de Saint-Marcel-d’Ardèche, l’entrée d’une commune dans la transition écologique peut se faire de multiples manières, l’important étant de lancer une première action, aussi modeste soit-elle, qui en amènera une seconde un peu plus conséquente, et progressivement, pierre après pierre, le chantier va trouver une ampleur insoupçonnée au départ.
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